C'était un très bel après midi pour se balader dans le port. Le soleil brillait, le ciel était clair et une douce brise marine empêchait tout excès de chaleur. Bien des gens se baladaient profitant du temps pour regarder l'océan. Mais aujourd'hui, Lysander ne flânait pas au port. Suite aux incidents du café du sentier perdu son père lui avait assigner la tache de superviser le déchargement d'un bateau. Travail long, nécessitant une attention soutenue. Il fallait diriger toute une équipe, et ce genre de tâches étaient toujours confiées à un envoyé de la famille Royale, mais rarement à un prince.
Mais voilà, le père de Lysander en avait décidé autrement. Et puis, ça l'arrangeait pas mal d'avoir quelqu'un de confiance pour accomplir cette tache. Et pour couronner le tout, Lysander avait apprit qu'Ozuki avait frappé son gardien à l’hôpital. La journée était vraiment mal engagée.
Le bateau avait prit du retard, après avoir du faire un détour à cause de la météo. Du coup il arriva en milieu d'après midi au lieu de la fin de matinée. Lysander avait du supporter les regards curieux des employés, et le thé était plus que médiocre.
Au moins les gaillards commencèrent le boulot rapidement. Lysander regardait attentivement les cargaisons descendre, et contrôlait les contenus des caisses, cochant sur ses feuilles ce qui arrivait. Le nombre, le poids, l'état, tout devait être noté. Un travail à faire consciencieusement. L'après midi fut donc ponctué par des Mettez ça là! et des Allez y. Le garçon s'avéra être un bon dirigeant d'opérations, le travail fut fait en un temps record et les ouvriers purent s'en aller. Bon nombre lui jetèrent un regard reconnaissant pour son efficacité. Une fois tout cela finit et le déchargement terminé, Lysander devait encore remplir les formalités pour permettre au bateau de s'en aller.
Le capitaine ne connaissait de l'île que ce qu'il voyait en arrivant. Il venait de l'extérieur. Il n'avait même pas le droit de descendre du bateau. Lysander eut donc un échange passionnant avec lui. Le capitaine lui parlait de l'extérieur, et Lysander lui parlait de l'île. Le gars n'avait jamais eu l'occasion de discuter avec un membre de la famille royale.
Il était 18 heures lorsque tout fut terminé, le navire repartait déjà vers de nombreux horizons. Lysander contacta son père par téléphone.

Père ? Le déchargement est terminé. Je pense rester dans le port quelques temps avant de rentrer.

Son père aimait bien son efficacité, alors il le mettait à contribution dès que possible. Surtout que Lysander n'était affecté à aucune tache en particulier. Un jour son père déciderait qu'il devrait assumer un poste à temps plein. Mais en attendant, Lysander profitait de son oisiveté.
Il commença à se balader le long du port. Il ne venait pas souvent dans ce quartier. Les couchers de soleils sur l'océan lui rappelaient de mauvais souvenirs. L'astre commençait à se rapprocher de l'horizon, aussi se détourna-t-il dans l'intention de se poser dans un bar tranquille. Impossible de trouver un salon de thé dans un quartier portuaire.
Les marins finissaient leurs travail, l'air se rafraîchissait. Qu'allait-il faire de sa soirée ?

Un repas avec le Roi et quelques Réions s'éternise, grattant une bonne partie de l'après midi. Elizabeth hésite maintes fois à prétexter une fatigue pour échapper aux discutions qui ne l'intéressaient ni d'Eve, ni d'Adam. Mais elle sait se tenir en société comme il faut et c'était donc toute souriante, et des plus aimable et bavarde qu'elle finissait le repas aux côtés du Roi Abraham. Au moment où le couple royal prend congés et quittent la pièce en se tenant par le bras, la Reine chuchote quelques mots à son mari et tout deux partent dans un bref éclat de rire avant de se séparer pour voguer à leurs occupations.

Ça fait déjà un bon moment que Elizabeth n'a plus succombé à son petit plaisir secret. En deux temps trois mouvements, elle se glisse dans son dressing pour fouiner jusqu'à trouver ses capes. Quittant sa robe trop lourde, trop voyante et trop désagréable à porter, la jeune femme enfile ses vêtements plus communs et plus passe-partout.
Evidemment qu'elle a dans l'optique de sortir du manoir familiale et d'aller flâner en ville. Elle sait s'habiller, de maquiller et se coiffer pour passer inaperçu donc elle en profite. Elle étoufferait assez rapidement sinon, confiner dans cet endroit royal. Parce qu'Elizabeth, même si elle est très attachée à son Roi et qu'elle est assez heureuse là où elle est, y a une partie d'elle qui ne demande qu'à changer, qu'à tout bouleverser, à courir partout et à rire, à profiter. Mais cette petite fille en elle est bien étouffée dans un corset serré au possible.


Elizabeth dévale les escaliers comme si de rien n'était. Elle sort du parc le plus naturellement du monde et rejoint la ville. Aujourd'hui elle n'a rien de précis en tête, elle veut juste prendre du bon temps à flâner par ci par là. Elle ira peut-être à la recherche d'un nouveau livre ou d'une nouvelle idée à croquer. Elizabeth adore dessiner et c'est d'ailleurs cette excuse qu'elle use le plus souvent pour ses sorties.


De rues en rues, le temps l'a mené jusqu'au port. L'après midi a déjà bien avancé, le soleil commence à redescendre dans le ciel. Ça fait déjà trois bonnes heures que la Reine est assise sur une caisse, appuyée sur une autre, à croquer la mer et les bateaux. Les marins et les animaux. Une chanson lui tourne en tête depuis qu'elle est arrivée là, d'ailleurs. Dans le port d'Amsterdam, y a des marins qui chantent...


Et en parlant de Marins, l'un deux l'interpellent pour lui demander le moins poliment du monde de "bouger son cul de cette caisse, c'est pas une chaise merde quoi. " Elizabeth ne relève pas, elle se contente de hausser les sourcils, de soupirer et de lancer un pique avec un sourire en coin, lui disant qu'elle comprend bien pourquoi il est bon qu'à décharger.

La Reine lance sa cape sur ses cheveux, tombant à moitié sur son visage et repart voguer dans les alentours sans vraiment d'idée précise sur l'éventuelle destination. De toute façon, elle n'a rien de prévu ce soir et le Roi a, quand à lui, des tas de choses à régler avant la fin de journée alors elle n'est pas pressée. Feuilles à la mains, elle déboule entre les allées et évitent tant bien que mal les hommes qui couraient pour finir leur journée aussi vite que possible. Ennuyée par cette foule, Elizabeth se glisse dans une ruelle sombre pour rejoindre une autre partie de la ville. Les yeux baissés sur son croquis, elle ne pense qu'à ce qu'elle aurai pu faire autrement, quels détails elle a bien pu oublier. Un crayon plus épais n'aurait-il pas été mieux adapté pour la mer ?


Son carnet tombe au sol alors qu'elle évite de justesse une chute imprévue. Avant même de reconnaître ou de détailler les traits de l'inconnu, Elizabeth fronce les sourcils et lâche une râlerie ennuyée.

« — Arriver à se rentrer dedans dans une ruelle aussi vide, faut vraiment le faire exprès... » lança t-elle à moitié à elle même avant de mettre un nom sur le visage du jeune homme.

La probabilité de tomber sur un membre de la famille royale à cette heure la de la journée, dans cette partie là de la ville ? Infime n'est-ce pas ? Et pourtant. Lysander Fawkes se tenait face à elle.

« — Hm, c'est toi, Lysander. T'es pas avec ton père ? Tout à l'heure, il parlait de toi justement. » Lâchait-elle en se penchant pour ramasser son carnet avant de se dire que ne pas être désagréable avec son neveux serait une idée. Histoire d'éviter qu'il ne raconte à toute la famille royale que la Reine traîne dans des ruelles, seule, alors que le soleil se couche. « Qu'est ce que tu fais là ? » Ajouta t-elle en replaçant le haut de sa cape.

Lysander avait commencé à se balader dans des rues peu fréquentées, en quête d'un endroit sympa ou se poser. Mais comme il n'y avait que des bars, il devrait probablement changer d'apparence. Surtout qu'il portait sa tenue royale habituelle. Il sorti sa pièce d'échec et commença à la contempler. Il ruminait ses sombre plans pour l'avenir. Pour l'heure, il devait profiter de ces instants d'oisiveté, car avec le temps, il en aurait de moins en moins. Un violent choc le ramena à la réalité. Si lui se retrouva jeté à terre, la personne en fasse se rattrapa juste à temps. Le roi noir roula au sol. Lysander se précipita pour le ramasser avant même d'identifier l'autre responsable du choc. Il se redressa en époussetant sa tenue. Il avait l'air mécontent, mais la stupeur remplaça vite sa colère. La reine ?! Il n'en revenait pas. Et elle s'adressait à lui de façon si familière. Mais lui, il devait respecter le protocole. Il fit une courbette.

Majesté. J'étais chargé de superviser un déchargement extérieur. J'ai décidé de m'éterniser un peu ici. Il est plaisant de se mêler au peuple.

Il ne pouvait pas la tuer maintenant. Tout le monde chercherait le coupable. Il écarta cette idée, et préféra jouer le rôle normal de membre de la famille Fawkes, aussi « pur » fut il. Il se redressa. Il devrait rester près d'elle pour la protéger de tout soucis. Elle n'était pas très reconnaissable, mais lui l'était. Il devrait pallier à cela.

Souhaitez vous vous joindre à moi ? Je comptais aller m'installer dans un bar.

Tant qu'elle ne l'aurait pas congédié, il devrait l'accompagner. Autant en profiter pour suivre son projet initial. Il fut enveloppé d'énergie, et il prit ce que l'ont pourrait penser comme l'apparence d'un lui même adulte. Ses vêtements étaient devenus plus discrets, plus normaux. Elle accepta. Elle semblait légèrement curieuse. Mais il sentait aussi qu'elle n'était pas contente de se retrouver avec un Fawkes. Pour commencer il fallait dissiper tout malentendu.

Ne vous inquiétez pas, je ne parlerai pas de votre escapade. Moi même j'en fais régulièrement pour échapper à l’atmosphère quelque peu... étouffante de la cour.

C'était plus ou moins vrai. Elle comprendrait. A priori, ce n'était pas sa première escapade hors du château. Elle avait peur que ce soit rapporté, ou que les rumeurs se répandent. Lysander aurait eu la même réaction s'il n'était pas en droit d'être ici. Il inspira un bon coup. Il ne connaissait pas vraiment le quartier du port. Mais il savait qu'il se trouvait un petit bar pas trop mal fréquenté. Il en avait entendu parlé par les marins/dockers qu'il avait côtoyé aujourd'hui. S'il les retrouvait, alors il passerait pour quelqu'un de normal connaissant des gens normaux, ainsi lui et la reine passeraient pour des gens normaux. C'était vraiment obligatoire dans ces conditions. La normalité. Il insistait beaucoup sur ce mot dans sa tête.

Si vous voulez bien m'accompagner, je connais un petit établissement dans le coin.

Il la guida bon an mal an vers le lieu supposé ou se trouvait le bar. A son grand soulagement, l'établissement était bel et bien là ou l'avait espéré. Le poney flottant... Tu parles d'un nom. Ils entrèrent. À l'intérieur, l'ambiance était à la joie, la liesse de fin de journée. L'alcool coulait, et l'odeur amer faisait grimacer Lysander.
Ils trouvèrent une table un peu à l’abri du raffut ambiant. Un serveur vient vint bien vite prendre leur commande.

Pour moi un thé fera l'affaire. Et vous?

Il pouvait la vouvoyer, ils passeraient juste pour un couple... Ce n'était pas grave. C'était presque amusant. Une partenaire pour ses escapades incognito. Il se ressaisit. Il ne devait pas oublier qui il avait en face de lui.

Révérences. Courbettes. Politesse et vouvoiement. Pour un peu, la Reine aurait oublier son rôle. Fallait dire qu'avec sa cape et ses escapades, Elizabeth oublie rapidement ses devoirs lorsqu'elle s'évade comme ça. C'était d'ailleurs le but même de ses fuites. D'instinct, elle répond aux courbettes de la façon habituelle avant de balader son regard dans la ruelle toujours aussi vide.
Lysander propose d'aller boire un verre, de garder le silence en même temps qu'il se changeait, instantanément. Elizabeth observe son don s'activer alors qu'elle accepte la proposition d'un hochement de tête. Polie, elle garde le silence jusqu'à ce que son interlocuteur finisse ses phrases. Mais elle ne tient tout de même à mettre une chose au claire avant de le suivre.

« — Je te suis avec plaisir, mais que l'on se mette d'accord, tu ne me proposes pas cela parce que je suis Reine et que tu te vois mal tourner les talons ? Tu peux partir vaguer à tes occupations si tu as autre chose de prévu tu sais ? » Le prévenait-elle en le regardant droit dans les yeux.

Non, parce que si ça lui fait plaisir d'aller passer du temps hors du manoir royal en compagnie d'un membre de la famille, elle ne tient quand même pas à ce qu'il se sente obligé de le faire. Elizabeth savait que son rôle gênait certains, mettait mal à l'aise certaines personnes, ou l'inverse, mais si souvent ça ne la dérangeait pas et si elle n'y prêtait habituellement pas attention, elle tenait toujours, lors de ses sorties solitaires, à ce que l'on se comporte avec elle comme avec n'importe qui.  Et alors qu'il accepte cette condition, elle enchaina la conversation sur ce qu'il disait quelques minutes auparavant.

« — Avec plaisir, je cherchais justement où aller. »

Le poney flottant ? Elizabeth n'y avait jamais mis un pied mais était souvent passée devant. Sans jamais y entrer en fait. La porte passée, la table choisie, et une fois installés, la commande allait être passée. Un thé pour monsieur, une grosse hésitation pour madame.

« — Un thé, noir, s'ils vous plaît. »

Le serveur lança un regard aux deux arrivants, regard légèrement amusé dont Elizabeth ne cherche pas à comprendre la signification. Sûrement qu'il les prenait pour un drôle de couple. Après tout, qui boit du thé à cette heure la ? C'est l'heure à laquelle, dans les bars, les hommes marins passent doucement par différents stades... Le vin, la bière, le rhum... Pour l'instant, à la table des deux bavards, l'heure été au thé. Et c'était peut-être mieux comme ça.

« — Alors comme ça tu trouves l'atmosphère étouffante ? » demande t-elle, curieuse, avec un sourire en coin à Lysander.

Elle comptait le laisser répondre avant d'enchainer elle sur ce même sujet. Parce qu'elle même, elle n'en pensait pas moins. Mais de là à le dire ouvertement dans un bar à un membre de la famille, c'était peut-être pas forcément la meilleure idée.

Elle ne voulait pas Lysander reste avec elle par obligation... Soit, il aurait bien tourné les talons, mais il était tout de même curieux. Il ne connaissait que peu cette tante, peut être était il temps de faire connaissance... et apprendre ses faiblesses...
La situation l'amusait en fin de compte. Alors que l'alcool de fin de journée commençait à couler à flots, l'étrange couple sirotait une tasse de thé, dans un coin de l'établissement. Et finalement, le dialogue s'engagea. Lysander la jaugea du regard en préparant une réponse. Même si l'ambiance était détendue il devait peser ses mots.


Oui... étouffante. La cour est remplie de gens de toutes sortes. La plupart des gens portent un masque pour cacher leurs intentions, et bien que nous nous en rendions comptes, nous sommes contraints de faire comme si de rien était. Sans parler du protocole. La politesse est certes indispensables, mais parfois les courbettes à répétition et autres... a force on à plus l'impression de jouer une pièce de théâtre que d'être en famille. Il reprit une gorgée de thé. Et tous les artistes ont besoin d'une pause. Vous ne me contredirez pas sur ce point.


Il riait sous cape. La reine elle même semblait être sujet à cette saturation de la cour. Se balader en ville était vraiment plus épanouissant. Le garçons profitait de ses escapades pour observer les gens, découvrir des spécialités, culinaires ou non. Et puis personne ne prennait de gants en ville, pas de courbettes, pas de stupides formules de polisses à part bonjour, au revoir et merci. Un bonheur. Et puis Lysander pouvait œuvrer en ville sans crainte d'être surveillé, mais c'était une autre histoire.


Et vous ? Pourquoi vous balader en ville?


Il attendait sa réponse avait un réel intérêt. Peut être Lysander avait-il deux tantes spéciales finalement. En attendant d'avoir à massacrer la reine en plus du petit monde, il pouvais bien profiter de l'instant.
Le bar se remplissait de plus en plus, et chez certains l'ivresse commençait à se faire sentir. Lysander espérait juste que tout se passerait tranquillement. Il fréquentait assez souvent les bar pour savoir que les bagarres ou les dérives n'étaient pas rares. Après tout dépendait des établissements, mais ceux du port... les marins de par la pression du travail, tombaient parfois les limites de la bienséance. Enfin, s'en prendre à eux ce soir était une mauvaise idée. Lysander à lui tout seul représentait un grand danger, et les pouvoirs de la reine selon les informations de Lysander, pourrait très bien la tirer d'un mauvais pas. L'important pour l'heure, était de ne pas être reconnus.
La tasse de thé fut bien vite vide. Lysander regarda la reine, posant alors une question muette. Rester ici ou aller ailleurs ? Il était capable de boire des tonnes de thé avant de se lasser. Peut être vallait il mieux éviter de jouer aux échecs avec la reine, surtout que la seule personne à rivaliser avec lui était son autre tante.

L'ambiance semble particulièrement détendue et même si le drôle de couple éphémère sirote calmement du thé, d'autres sont déjà en train de moisir leur foie avec différents alcools plus forts les uns que les autres. Les yeux d'Elizabeth ont fait un rapide tour dans la salle alors que Lysander finissait la gorgée qu'il venait de prendre. Elle sentit le regard du jeune homme se poser sur elle comme pour la détailler quelques instants avant de se lancer dans une réponse à sa question. Elizabeth joue avec l'une de ses bagues du bout des doigts alors qu'elle laisse sa tasse refroidir.

Lysander se lance. Il commente le fait que la cour soit remplie de gens de toutes sortes, il parle de leurs masques, des courbettes et des formules de politesses à tout va. La comparaison des journées au manoir avec une pièce de théâtre arrache un sourire amusée à Eli qui a ses yeux plongés dans le thé qu'elle agite. Un silence et il continue. Les pauses des artistes. La jeune femme relève ses yeux et observe son neveu. C'est dingue qu'un corps d'enfant puisse avoir des réflexions si mature. Elizabeth sait qu'il a bien raison. Qu'à la cours, tout le monde s'habille de la tête au pied. Les gens se cachent derrière des grandes robes, des beaux costumes et des bijoux hors de prix. Mais ils se planquent aussi derrières des masques et des caractères qui ne les définissent pas. Ne mentez pas, vous savez bien qu'on ne peut être toujours souriant, toujours de bonne humeur, toujours d'accord avec les faits et gestes des personnes plus "importantes" que vous.

Elizabeth sourit mais ne dit pour l'instant rien. Évidemment, il lui retourne la question. Là, c'est un gros dilemme dans sa tête. Elle pèse le pour et le contre. Elle est bien d'accord avec tout ce qu'il a dit mais elle devrait peut-être défendre les "siens", ceux qui portent tout comme elle un masque. Le masque de la bonne tenue en société. La belle gueule qui passe bien, le caractère passe partout pour bien se faire aimer. Elle agite une dernière fois son thé avant d'en prendre une gorgée. Un sourire en coin se dessine sur son visage alors qu'elle repose la tasse dans sa soucoupe.

« — Ce n'est pas moi qui vais te contredire sur ce point. Chacun se forge un masque avec les sentiments qu'il souhaite dévoiler. Quelques petites faiblesses par ci par là histoire de ne pas paraitre trop superficiels, des belles paroles aussi histoire de se faire bien voir par les autres... » Elle pose ses yeux sur sa bague avant de replonger son regard dans celui de Lysander. « Mais j'ai le sentiment que tout cela est aussi valable pour la ville et le reste de l'île. Peut-être de façon moins condensée mais tout de même. Chacun se glisse dans un rôle pour être comme tout le monde. »

Elle se tait. Elle en a assez dit comme ça sur ce qu'elle pense de la cours et de ses habitants. Elizabeth reprend une gorgée de son thé et sent bien qu'elle a tout intérêt à repartir dans un sujet plus banal, plus commun, plus habituel. Plus adaptée au discours qu'une reine pourrait avoir. Enfin, ça en fait, c'est déjà fichu en fait. Elle hausse les épaules intérieurement et observe la salle. Eli réfléchit.

« — Tu travailles sur le port ? Ton père parlait de ça le soir dernier. C'est comment ? Enfin je suppose que c'est cela qui t'amène par ici à cette heure là, pendant ta pause théâtrale ? »

Un changement de sujet sans vraiment en être un. Un sourire en coin lorsque la jeune femme évoque son rôle à lui dans la pièce de théâtre. Elle serai curieuse de poser des questions quand à ses différents sentiments par rapport à tel ou telle personne de la cour. Elle serait curieuse d'en savoir plus sur sa place dans le manoir.

Eli observe la salle silencieusement. Elle se remplit de plus en plus et des hommes comme des femmes emplissent le lieux à une vitesse hallucinante, enchainant les verres de thés, d'alcool et encore d'alcool. Ses sourcils se froncent lorsqu'elle aperçoit un homme levé son poing en direction d'un autre. Mais la bagarre est évité par le barman qui pousse une gueulante envers les deux opposants et évite l'éventuel échange de coups qu'il y aurai pu avoir entre eux. Liz' secoue la tête, elle a tendance a trouver ça un peu stupide ceux qui se battent sans trop de raison.

Lorsqu'elle repose ses yeux sur Lysander, il semble l'interroger du regard. Tasse vide à la main, elle comprend rapidement sa silencieuse question : Rester ici ou aller ailleurs ? Pour toute réponse, elle porte sa tasse à ses lèvres pour la finir et dépose quelques pièces sur la table avant de se relever, adressant un sourire à Lysander. Trop curieuse d'en savoir plus sur lui, elle espère quand marchant un peu dans les ruelles de la ville jusqu'à un autre endroit, elle pourra en apprendre un peu plus sur son neveu. Sans attendre une éventuelle formule de politesse qui voudrait que ce soit l'homme qui paie l'addition, qui pousse la porte, ou quoi que ce soit d'autre, la jeune femme se dirige vers la sortie avant de remettre sa capuche sur son crâne d'un geste sec de la main. Habitude en ville, elle a juste le réflexe de l'enfiler lorsque le temps se gâte et les quelques gouttes qui perlent par ci par là suffisent à la motiver de mettre sa capuche.

La reine semblait tout de même plutôt bien accepter cette situation à la cour... peut être par amour. Lysander haussa intérieurement les épaules. La seule chose certaine c'était que la reine ne lui disait pas tout. Quoi de plus normal, elle ne pouvait pas décemment critiquer le système dirigé par son mari... et elle même. Sans compter que c'était avec un Fawkes qu'elle parlait. Le changement de sujet ne se fit pas attendre. Le garçon sourit.


En effet, j'ai passé l'après midi à surveiller le déchargement de marchandises extérieures. C'est intéressant, mais je m'en serais bien passé. J'ai écopé de cette... « sanction » suite à l'agitation que j'ai causé récemment dans un bar. Non pas que je soit un simple ivrogne qui finit par frapper tout ce qui bouge, mais je n'aime définitivement pas que l'on me traite comme un simple gamin... dur quand on voit mon apparence. D'autant plus lorsqu'on en profite pour me violenter. Enfin, ce fut un acte irréfléchi.


Il n'était pas fier de l'incident, sans réfléchir il avait malmené un ivrogne parce que celui ci l'avait appelé gamin et avait osé l’attraper par l'épaule. Ça aurait pu en rester là si l'homme n'avait pas décidé de monter se venger. Le Fawkes soupira.
Finalement la reine décida d'accepter son appel silencieux pour changer d'endroit. A cette heure que pouvait-ils bien faire ? Lysander se souvint d'une course à faire non loin. Il cherchait un livre et il avait eu un mot d'un libraire lui affirmant avoir reçu ledit livre. Le suprême préféra ne rien dire pour le paiement de l'addition, et quitta sa table sans montrer quelque émotion que ce soit... Ce qu'il ressentait en fait.
Dehors la pluie commençait à pointer le bout de son nez. Lysander n'avait rien pour s'en protéger mais ça n'était pas important.


Je souhaiterai passer dans une boutique non loin d'ici, vous m'accompagnez?


Une fois la réponse positive obtenue, le garçon guida sa tante dans les rues proches du port. Ils arrivèrent devant une vieille librairie. Mais il ne fallait pas juger celle ci sur son aspect, le propriétaire faisait toujours très attention à ses approvisionnement et si l'on pouvait trouver nombre de livre anciens, il y en avait au moins autant de récents. C'était d'ailleurs pour cela que Lysander s'y rendait fréquemment. Pour couronner le tout, le libraire n'hurlait pas sur tous les toits qu'un Fawkes fréquentait sa librairie. Lorsqu'ils entrèrent, une petite cloche tinta. Le patron vint immédiatement à leur rencontre. Un vieil homme que la retraite ne tarderait pas à cueillir, mais toujours l’œil vif et manifestement bien portant.


Ah, monsieur Lysander, comme je vous l'ai écris, j'ai votre livre, attendez un instant.


Il adressa un signe de tête à la reine qu'il ne reconnu même pas. Pendant que le vieil homme s'éclipsait dans l'arrière boutique. Lysander lui, commença machinalement à parcourir les rayonnages, qu'il commençait tout de même à connaître. Malgré cela, il lisait le titre de chaque volume, à une vitesse qui forçait le respect. Il s'empara de deux livres traitant l'histoire de l'extérieur et s'approcha du comptoir. Le libraire revint, tenant un livre neuf, traitant des dernières innovations en matière de bio-technologie. Lysander lui tendit les deux livres et paya. L'homme emballa ses livres et les lui tendit. Le Fawkes se tourna vers la reine.


Quelque chose t’intéresse ici ? J'ai terminé.


Il l'avait tutoyé d'un ton parfaitement naturel, inutile d'éveiller les soupçons du vieillard.

Elisabeth écoute silencieusement les paroles de son jeune neveu et sourit en apprenant les détails des raisons qui ont poussé son père à le punir de cette façon. Elle comprend la punition du paternel mais aussi le sentiment qui ont poussé le Fawkes à réagir envers celui qui l'avait provoqué et traitait comme un gamin. C'est jamais un sentiment très agréable de se sentir jugé, encore plus sur son physique alors que parfois le vase déborde, ça n'aurai pas dû étonner son père. Après un échange de regard silencieux, les deux jeunes gens tombèrent d'accord sur le fait de quitter les lieux et de se diriger ailleurs. 

Une fois sur le pas de la porte du salon de thé, Eli observa autour d'elle. La pluie commence à tomber légèrement alors que Lysander lui propose de l'accompagner dans une boutique non loin d'ici. Un léger sourire sur son visage, un petit haussement d'épaule et Eli acquiesce. 



La jeune femme croise ses bras derrière son dos, au niveau de ses fesses, alors qu'elle vient de jeter sa cape sur son crâne à cause de la pluie. Marchant à côté de Lysander, ils ne purent continuer leur conversation à cause de la foule qui les entoure et du bruit ambiant.  Leur conversation pourrait attirer l'oreille de curieux et ce n'était pas forcément la meilleure chose à faire. Eli parcoure les rues du regard, glisse ses yeux sur les fenêtres, sur les portes, sur les visages aigris de certains passant, écoute le rire et le timbre de voix d'autres. Elle se sent vivante en ville même si elle ne communique pas, même si elle erre juste d'un point à un autre. Elle apprécie depuis toujours venir ici et observer la vie.

Une allée à gauche, deux à droite, tout droit un long moment, une petite ruelle sombre et une grande rue plus loin et voilà les deux Fawkes arrivés à destination. Eli observe silencieusement le triste aspect de la librairie devant laquelle elle se tient. Un léger très léger sourire en coin se trace sur ses lèvres alors qu'elle détaille les boiseries anciennes et salies par le temps qui décorent l'entrée de la petite boutique. Elle laisse son neveu rentrer en premier dans la pièce alors qu'elle se perd encore quelques instants à retenir des détails qu'elle retracera plus tard sur du papier.

Le tintement d'une cloche semble réveiller la pièce endormie alors que Lysander pousse la porte de la librairie. Un vieil homme s'approche alors d'eux, un sourire aux lèvres pour les accueillir. Il reconnu de suite le jeune Fawkes et savait déjà ce pourquoi il venait. Elizabeth est agréablement surprise de l'accueil, de la politesse et de la rapidité à mettre un nom sur un visage et sur une commande que possède le vieillard et elle se note l'adresse dans un coin de la tête pour y revenir plus tard. Lorsque le vieil homme lui adresse un signe de tête, elle s'empresse de lui rendre alors que Lysander s'élance doucement dans une des allée.

Machinalement, elle s'avance dans une des allée voisine à celle empruntée par son neveu. Ses yeux déambulent de livres en livres, de titres en titres. Elle ne cherche rien de précis, il faut dire que la bibliothèque du manoir est particulièrement complète et elle tient un point d'honneur à l'alimenter souvent aussi bien en livres anciens qu'en nouveaux romans. Mais cela ne retire rien au plaisir de se balader dans cette petite librairie. Eli s'arrête face à un ouvrage. Une couverture qu'elle connait par coeur, un résumé aussi d'ailleurs. Elle pose ses doigts dessus et caresse les pages de l'ouvrage vieillit. Le petit prince semble endormi sous une légère couverture de poussière. Les yeux de la jeune femme se perdent quelques instants dans ses souvenirs avant que le bruit du vieil homme revenant ne la sorte de ses pensées. Elle secoue la tête brièvement avant de se retourner pour revenir au centre de la boutique. 

Curiosité faisant, Eli pose les yeux sur les ouvrages commandés par Lysander. Deux vieux livres sur l'histoire de l'extérieur et une nouveauté sur les innovations bio-technologique. La jeune femme s'amuse du contraste entre les différents livres et se tient silencieuse, les mains à nouveau croisés au niveau de ses fesses. Lysander se retourne et l'interroge. 


 
Elle adresse un grand sourire au vieil homme avant de le remercier et de le saluer. Eli ne tilt même pas sur le tutoiement. Le vouvoiement est l'une des choses qu'elle apprécie le moins au manoir. D'après elle, il est obligatoire juste pour consolider un petit peu plus les distances qu'il est bon de tenir les uns entre les autres. Elle s'étonnera toujours de devoir vouvoyer son propre mari en présence de nombreux invités, ses propres enfants aussi d'ailleurs. C'est donc presque naturellement qu'elle suivit le tutoiement lancé par Lysander.

Une fois sur le pas de la porte, elle réfléchit quelques instants et observe les noms de rues aux alentours. Rue James Cook. Elle se trouve donc à quelques pas de la boutique où elle s'approvisionne pour dessiner. Après avoir lancé un regard à Lysander, elle lui adresse un léger sourire avant de prendre la parole.



Eli vient d'apprendre que son neveu aime lire, il pourra comprendre qu'elle aime dessiner. Petit échange d'informations banales quoi... Après que Lysander accepte sa proposition, Elizabeth se mit en route. Il fallait soit repasser par le port donc un détour assez important, soit emprunter les petites ruelles qui lacèrent la ville. C'est ce second choix qu'elle choisi pour ne pas perdre de temps et ne pas tomber face au volet fermé de la boutique.